NOTES

 

E.-B. Deschauffours fut bûlé en place de Grève pour sodomie en 1726, mais il était aussi accusé du meurtre de l'un de ses partenaires; il était surtout le tenancier de la maison de passe de luxe des homosexuels de la Cour et de la Ville. Son exécution fit diversion à la même accusation de sodomie portée contre Desfontaines -voir la note à «Desfontaines» en II, 3, 2.

 

La phrase de Hugo, prise au pied de la lettre, implique qu'on aurait « vénéré » l'homosexualité de Louis XV dans le même temps qu'on brûlait Deschauffours. On ne trouve évidemment nulle part l'éloge des moeurs du Roi, mais l'édition du Journal de Barbier qui se trouvait à Hauteville House et sur laquelle Hugo prend de nombreuses notes à l'hiver 1862-63, est explicite sur l'inquiétude que donnèrent les amitiés du Roi en 1724 -deux ans avant le supplice de Deschauffours:

« Le1 ............... est repris à la mode à présent ............. qui ................................. le duc de Gesvres, qui a ................... les pratiques, par politique, l'a un peu divulguée, craignant que le duc de La Trémoille ne prit trop de crédit sur l'esprit de m.... et ne fit tomber le sien. M. le prince de Tallemont, oncle du duc de La Trémoille, a pris son neveu dans son carrosse, sous prétexte de le mener en campagne, l'a ramené à Paris, le grondant très-fort et lui a défendu de retourner à Versailles. On dit qu'on le marie avec mademoiselle de Bouillon, mais cela n'y fait rien, car le lendemain ces seigneurs .........................

M. le prince de Tallemont a fait cela un peu trop ouvertement; si [le Roi] demande le duc de La Trémoille, il faudra bien qu'il retourne à Versailles.

Le Roi partit hier, 30 de juin, pour aller à Chantilly, chez M. le Duc, passer un mois entier, à ce que l'on croit. Il y a grands préparatifs pour faire de grandes fêtes et de grandes chasses. [...]

On croit dans Paris qu'on va faire de grandes affaires à Chantilly; mais le sujet véritable du voyage est très croustilleux; on veut tâcher de donner au Roi du goût pour les femmes, et de lui faire perdre son ..... avec un ... On espère que cela le rendroit plus traitable et plus poli; en effet, il n'y a guère de jeunes gens dans ce voyage, tous ceux qui sont nommés sont d'un certain âge. C'est madame de La Vrillière qui est chargée de la commission, ou de le faire ............ la petite duchesse d'Épernon, qui est très-jolie et très-jeune, ou de le prendre pour elle-même. Ce dernier sera plus aisé, car la jeune duchesse ne pourra pas faire tout ce qu'il faut pour cela, au lieu que madame de La Vrillière, qui est jolie et qui est femme d'expérience mènera le Roi dans quelque bosquet, et lui fera faire ..... »

 

NOTE
1. Les points indiquent les mots effacés dans le mss. et qui n'ont pu être restitués, t. I, p. 653-4. Marais, Revue rétrospective, t. x, p. 245, sous la date du 27 juin 1724, complète ainsi le récit de Barbier: "On a découvert que le jeune duc de La Trémoille, premier gentilhomme de la chambre, lui servoit plus que de gentilhomme, et avoit fait de son maître son Ganymède. Ce secret amour est bientôt devenu public, et l'on a renvoyé le duc à l'Académie avec un gouverneur pour régler ses moeurs. Voilà donc le tour des mignons, et l'image de la cour d'Henri III! Le lendemain, on a proposé de marier ce jeune seigneur avec mademoiselle d'Évreux, sa cousine germaine, fille du duc de Bouillon et de sa première femme, qui étoit La Trémoille. Ce qui a été agréé du Roi, qui a bientôt sacrifié ses amours." Et plus bas, p. 247, à la date de juillet: "Le jeune comte de Lorges, renvoyé de la cour pour son libertinage. A tout cela, le Roi dit que c'est bien fait et ne se souvient pas d'eux, un moment après. On dit que le jeune duc de La Trémoille étoit gagné par mademoiselle de Charolois, qui devoit lui faire dire au Roi certaines choses qu'on ne veut pas que le Roi sache. Cette princesse, qui est fort aimable, est fort décriée." Voyez aussi la lettre de Voltaire, de juillet 1725. Correspond, générale, t. I, p. 144, édit. Lequien.